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Le roi aimait dormir, serein sur sa couronne, mais nul n’est parfait, même les rois ! Et les conteurs aimaient rire à ses dépends comme à chacune de ses étourderies.
Alors il décida d’un grand décret obligeant tout conteur à faire contrôler ses dires pas ses agents compétents. Mais diplomate, il émit un second décret pour qu'une bourse leur soit donnée justement proportionnée à la qualité des contes pouvant plaire au roi.
Ainsi ceux qui voulaient vivre libre durent mettre leurs écrits en cage, car ceux qui voulaient écrire libre se retrouvaient en cage.
Le roi pu dormir enfin tranquille sur ses deux décrets. Les conteurs reconnaissants louaient son intelligence, les conteurs récalcitrants souffraient dans l’indifférence.
Mais c’est un fait bien connu, le chat trop nourri ne voit plus les souris. Puisque nul n’osait plus dire au roi quand il se laissait aller à faire des bêtises, il fut bientôt plus que convaincu de ses grandes compétences et fini par faire de véritables conneries.
Mais le plus triste est qu’il ne prenait même plus plaisir à écouter ses conseillers quand ils l’honoraient d’éloges mérités, convaincu que ce n’étaient que veules flatteries.
Qui apprécie l’été dans un pays sans hivers ? Connait-il vraiment le plaisir du fauteuil celui qui n’a pas enduré la poussière des chemins ? Sans miroir qui peut savoir s’il se coiffe bien ? Ainsi sans critique il n’existe point d’éloge, et nul ne peut se parfaire.
Ainsi emmitouflé dans des contes à dormir débout, le roi n’a pas su le pays prendre froid, mordre faim, crier colère, car personne n’osait le lui dire.
Le roi dormait tant et si bien qu’un jour, personne n’a osé lui dire pourquoi, des inconnus vinrent lui couper la tête.
Moralité : Censurer les autres, c'est se tromper soi-même.