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Cher cousin Horace
Vous narrez avec tant de délice les intrigues des gens de la grand’cour d’Ile de France, que j’ai l’heur de vous conter nos aventures provinciales. Savez-vous qu’ici aussi se passent des évènements qui méritent considération et peuvent être source d’intelligence.
Vous méconnaissez peut-être le maçon de notre paroisse, le Grand Gustave, avec ses journaliers et ses apprentis, il a maçonné ou retapé tous les mas du canton. Il ciselait la pierre, appareillait la poutre ou embrevait ses tuiles avec métier. Ses chantiers étaient toujours aimables à visiter, car Gustave celait toujours au frais un rosé gaillard et autant de godets que de convives, et si les paroissiennes esquivaient soigneusement les drôleries à Gustave, c’est que les rires eux-mêmes auraient réclamé confession. Avec l’aide de Dieu et un peu de constance la besogne s’achevait bon gré mal gré.
Un jour un pauvre hère parvint au bourg, il heurta longtemps l’huis de chaque foyer pour mander du travail, il se disait maçon. Les métayers du conté rechignent à confier leurs bâtisses aux inconnus, mais il advint qu’impatient d’attendre Gustave, probablement à blaguer du haut d’une solive, un villageois finit par lui faire remanier son écurie. Le travail fut fait, bien fait, vite fait, et la dépense ma foi fort honnête ! Le chaland était ravi.
Dès lors, l’un après l’autre les bourgeois finirent par confier leurs ouvrages à l’immigrant. Faut dire qu’il se levait tôt, œuvrait tard et était taiseux surtout qu’il ne dégoisait guère notre patois local. Régulièrement, il repartait dans son lointain pays et revenait avec des outils neufs.
Gustave commençait à la trouver mauvaise et heureusement que quelques locaux continuait à lui confier quelques réparations, peut-être par charité, mais le vrai travail, la grand'ouvrage l’étranger la réalisait.
- « Oh Gustave, faut te lever matin, trousser tes manches et rogner tes prix si tu espères de l’ouvrage ! »
- « C’est ça, morbleu ! Mais les commis faut les payer ! Vous chiffrez ce que cela mange un commis ? Heureusement que les apprentis ne coûtent guère, mais faut toujours être à leurs basques, mais les commis ! … »
Seuls quelques vieux rechignaient par principe, d’engager l’étranger, mais il fallait attendre car Gustave avait finit par licencier tous ses commis, il avait pris plus d’apprentis mais cela ne faisait pas l’affaire aussi bien et pourtant les travaux coûtaient cher. Les clients n’osaient pas dire leur déception et se cachaient sous quelques rires de peur de se trouver gros-jean.
Un jour le tavernier se rendit compte que sa devanture mériterait vraiment un coup de ravalement, mais il eut beau lorgner sa cagnotte, il n’avait pas assez de ducats même pour payer l’étranger. Depuis quelques temps c’est vrai que le Gustave son principal pilier, ne venait plus boire ou faire la belote avec les clients, et ses commis ayant quitté le village ne venaient plus casser la croûte entre deux chantiers. Et fort le coût bon marché de l’étranger, il lui en manquait pour pouvoir le payer !
L’épicier était le plus en fâcherie envers l’étranger, il l’avait même jeté : « Ici ! Je ne sers pas les métèques qui viennent nous prendre le travail ! » Alors depuis ce jour l’étranger apportait son pain et son vin. L’épicier en fut encore plus marri !
Tout allait de mal en pis jusqu’à ce dimanche du conseil municipal, la colère grondait attisée par Gustave, « Il faut interdire l’accès de l’étranger au village ! » Oui criait l’épicier « qu’il retourne dans son pays ! » « Depuis qu’il est là tout va mal » renchérissait le cabaretier ! Le notaire proclamait : « L’argent que vous lui donnez fait vivre sa famille au pays ! Là-bas il joue les riches avec nos sous ! ».
- « Qu’il décampe ! »
- « Heu, il pourrait finir mon pigeonnier avant de partir ? »
- « Je le ferais, foi de Gustave ! »
- « Attendez! Il a aussi ma cheminée à rabibocher ! »
- « Demande à Gustave ! »
- « Madré ! J’ai point d'assez pour le payer !
Le maire s’apprêta donc à rédiger l’injonction d’interdit, mais la date posait problème…
Alors l’instituteur pris la parole et ce qu’il dit étonna tout son monde : « donnez-lui une maison, il restera ici, et pourra faire venir sa famille »
- « Vous délirez ? Boutez-le dans ses provinces ! »
- « Pourquoi ? Vous avez un bon ouvrier, vous acceptez son ouvrage, vous lui cédez vos économies, mais vous refusez sa présence ? Vous voudriez que tout votre argent continue à disparaître dans son pays ?»
Toute la nuit les cris fusèrent, il est même dit qu’ils ont failli se battre, mais l’instituteur parlait bien et plus têtu que lui il n’y a pas. Curieusement le curé, son contradicteur habituel, pris pourtant son parti, l’étranger étant paraît-il très croyant, une famille de plus pour l’église et quelques sous à la quête du dimanche en plus ne seraient pas de refus…
Tant et si bien qu’au matin, malgré menaces injures et fâcheries, le maire alla à contre cœur voir l’étranger et lui proposa d’acheter le vieux mas de la mère Joséphine que Dieu avait rappelée à lui depuis quelques temps.
Ce qui fut dit fut fait. L’étranger paya la masure au lieu de repartir avec ses gains, et fit venir sa famille, il mit ses enfants à l’école. Le temps a passé et la ruine est aujourd’hui retapée, splendide, pleine de fleurs, Il a ouvert un compte chez l’épicier, il a appris la belote et joue maintenant à l’auberge avec Gustave, et son patois tout neuf avec l’accent les fait éclater de rire, il leur arrive même souvent de travailler ensemble sur les chantiers difficiles et leurs engueulades bon enfant sur les difficultés à résoudre faisaient florès.
Le seul ennui, et cela fâchent les parents méconnaissant les criailleries de leurs gamins, car à la communale, ils se sont instruits de nouveaux jurons... Il paraît que c’est du polonais…
Voilà cher cousin de quoi conter dans les chaumines, comme vous voyez, il y a de part chez nous de quoi recueillir de beaux dires.
Allez et je vous souhaite autant de bonheur vers chez vous !
Votre cousin Gontran
Une propagande dangeureuse qui fait passer les français pour des faiengnants. En vérité, il faut retenir qu'il a été payé non déclaré et l'immigré a été exploité. Oui effectivement, nous avons des corrumpus qui s'arangent pour nous arnaquer. Le mercantilisme est devenu le pire ennemi des français. Bonne nuit Alain. Je parie que la réponse la plus donnée, est A travailler ou interressant. Moi, je vous trouve extrement dangereux car vous travaillez à faire des français de pacifs humanistes incapables de tenir une épee pour se défendre.